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6ème année : 2023-24

Invitation et programme
2023-24

Depuis maintenant cinq ans, une école de philosophie existe à Verfeil-sur-Seye dans le Tarn et Garonne (82). Cette école a été créée afin de partager et forger ensemble, par l’étude, l’écoute et la discussion, des outils conceptuels capables de nous aider à comprendre ce qui nous entoure et nourrir nos révoltes contre le monde tel qu’il va.

Nous avons passé l’année dernière à parler de l’ORDRE DES CHOSES alors que soufflaient des vents de colère, d’émeute et de répression. Nous avons emprunté des chemins détournés ou imaginaires, terre à terre ou métaphysiques. Des exposés ont eu lieu, qui traitaient de ménage comme effacement du corps, d’ordre moins le pouvoir et de free-jazz, du montage comme idée et comme opération, d’une possible justice anarchique, et de vers libre en tant que révolte contre l’évidence. Mais nous ne sommes venus à bout ni de l’ordre ni des choses. Alors, nous allons continuer d’ouvrir des portes et nous vous invitons à nous rejoindre.

Cette année les invitations sont ouvertes pour chaque samedi qui clôturera les semaines de recherche. Il y aura un exposé suivi de moments de réappropriation du cours sous la forme de discussions libres - en mixité ou mixité choisie - d’exercices de problématique, ou d’analyse de texte.
La jauge est ouverte à 30 personnes par samedi (en plus des personnes déjà présentes). Les repas sont pris en charge ainsi que le couchage si vous venez de loin !
Vous pouvez donc réserver certains week-end, ou tous, selon vos désirs, et nous envoyer un mail à l’adresse : ecoledephilosophie@riseup.net

— Samedi 28 octobre 2023
L’ordre est-il une chose ? Schelling et la critique de la philosophie comme fondement

Nous avons vu l’année derniere que si l’ordre n’existe pas sans principe, vouloir fonder quelque chose sur un principe relève du délire. Or, pour le malheur de la philosophie, sa fonction est de jouer le rôle du fondement. En même temps, et pour notre bonheur, ce rôle-là se trouve critiqué depuis environ deux siècles. Critiquer le fondement et trouver que le principe fondateur n’existe pas signifie revenir toujours à ce fait-là, à répéter au lieu d’oublier. Pour en recommencer encore, nous allons passer par le vertige du philosophe allemand F.W.J. Schelling, qui, il y a donc deux siècles, démasquait comme un des premiers le vide du fondement. Sa réaction fut une fuite en avant - si l’ordre des choses relève de la mort, il ne suffit pas de ressusciter les morts - ou encore reconnaître l’historicité du monde -, seul considérer l’existence des choses comme personnalité restait le chemin à suivre pour la philosophie.

— Samedi 17 février 2024
Ce qui reste : mathématique et dysharmonie

« Dieu n’autoriserait pas un tel désordre près de lui dans le ciel. De plus, observe Dame Arithmétique, si les mouvements des astres étaient incommensurables, notre fille obéissante, la Musique aux doux sons, seraient privés d’honneurs célestes, alors qu’elle contribue à régir le ciel, comme l’attestent de nombreux évènements physiques. »

— Samedi 13 avril 2024
Production, reproduction, care

En 1978, Colette Guillaumin écrivait : « On sait que certaines tâches sont empiriquement associées au rapport d’appropriation corporelle. (…) Ces tâches d’entretiens matériels des corps comportent nourriture, soins, nettoyage, élevage, entretien sexuel, soutien affectivo-physique, etc. »
Faut-il appeler ces tâches travail reproductif, travail domestique, travail du care, travail du sexe - ou travail féminin ? Quoi qu’il en soit, ce travail est invisible. Dans ce cours, nous vous proposons d’étudier des textes d’anthropologie et de théories féministes pour comprendre en quoi leurs pensées, certes articulées elles-aussi à la notion de « travail », peuvent nous aider à repenser les catégories traditionnelles de l’action, et peut-être à dépasser la centralité contemporaine de la production. Notre pari est que le caractère inclassable, oublié et en définitive invisible du travail reproductif en fait un poste d’observation pertinent pour penser à la fois le travail et le féminin.

— Samedi 29 juin 2024
Nos bonnes intentions

La fenêtre depuis laquelle nous voyons l’espoir d’inverser la tendance face au désastre écologique semble chaque jour se refermer un peu plus. Nous sommes pris·es par cette tension : dire ce qu’il faut faire au nom de la situation nous fait tomber dans un autoritarisme dont nous ne voulons pas ; ne rien vouloir imposer au nom du respect de l’altérité nous maintient dans un relativisme moral qui ne permet pas les transformations que nous jugeons pourtant nécessaires. Que faire, ou plutôt : comment être ? D’un côté comme de l’autre, nous nous perdons, nous sonnons faux. Sommes-nous condamnés au basculement d’une position à une autre, à une oscillation permanente ? Faut-il alors chercher une juste position, se mettre en quête d’un point d’équilibre éthique ? – tel sera l’objet de ce cours.


La vraie vie

Novembre 2018

Exemplifier

Tout peut servir d’exemple. Donc il n’y a pas d’exemple en soi.
A première vue, l’exemple de quelque chose est là pour consolider l’existence d’autre chose, pour faire advenir son être, pour l’imposer. On dirait que l’exemple est de l’ordre de l’impur, de l’imparfait, dévoilant partiellement et imparfaitement une réalité qui lui est supérieure. L’exemple a une fonction de monstration, il fait signe vers autre chose qui est extérieure à lui-même.

Exposé

la vraie vie

novembre 2018

La vie bonne : genres et formes de vie dans la philosophie antique

Quand la philosophie apparaît au Ve siècle av. J.-C., elle ne naît pas comme science, mais comme mode de vie. Philosopher, c’est vivre un certain genre de vie et, si l’on en croit ceux qui le vivent, le meilleur parmi tous. La vie bonne, c’est la vie contemplative. Une telle affirmation s’appuie une réflexion plus large sur les formes de vie – qui ne se réduit ni à la biologie, ni à la sociologie, ni à l’anthropologie, mais qui se situe en
deçà du partage entre l’étude générale du vivant et celle de ses formes singulières. La philosophie n’est donc qu’une forme de vie parmi les autres, mais cette forme prétend être la plus haute. Il faut donc chercher à comprendre ce qui lie l’étude des formes de vie à un plaidoyer pour la vie philosophique. Si le mot grec theoria ne signifie pas simplement « théorie », c’est-à-dire un savoir coupé de l’expérience, mais « contemplation », c’est-à-dire un certain rapport vivant à ce qui est, alors il faut examiner en quoi ce rapport peut prétendre être plus vrai que les autres.

Exposé

La vraie vie

décembre 2018

Vie et vérité chez Nietzsche

Pour cette séance, on commencera par suivre le raisonnement de Nietzsche dans sa dimension destructrice. Ce dernier s’attaque en effet à tous les discours prétendument absolus – par exemple ceux de la philosophie ou de la religion – pour les ramener au type de vie qui l’énonce, en se demandant à chaque fois qui parle. Nietzsche est ainsi un des premiers auteurs à détruire la croyance en l’existence de vérités indépendantes de leur situation d’énonciation, et des rapports de pouvoir particuliers qui les caractérisent. Cette forme de nihilisme fait aujourd’hui partie de notre condition contemporaine : pourquoi choisir un mode de vie plutôt qu’un autre si toute croyance peut être réduite à une stratégie vitale ?
On verra ensuite comment Nietzsche tente de sortir de ce nihilisme. Pour cela, il lui faut reconstruire une distinction entre différentes existences plus ou moins authentiques, à l’intérieur d’un cadre où toute transcendance a été détruite. On examinera sa proposition, qui en passe entre autre par une opposition entre force et faiblesse, et on en questionnera les limites.