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Du sale

Laver, ranger

Cette année nous allons nous intéresser à L’ordre des choses, et il nous semblait important de commencer cette réflexion par son sens le plus méprisé, le plus terre à terre et donc, quel dommage, le plus éloigné de la philosophie (le mariage entre matérialité et philosophie n’étant pas conclu) : le ménage.

A la base de l’école de philosophie, comme il est d’ailleurs écrit dans le manifeste, il fallait lier la pensée à ses conditions matérielles, ne pas la détacher absolument de ce qui la permet : c’est-à-dire des corps dans un espace dont on prend soin, des corps qui mangent, qui dorment et qui ont des besoins, qui s’inscrivent dans un village, une maison. Ce lien s’est fait principalement sur le plan pratique : des tableaux des charges, qui ont été renommés tableau des tâches, des vaisselles, des ménages, des râleries sur le fait que ce sont toujours les mêmes qui rangent, que c’est genré et que c’est toujours, toujours la même histoire, des équipes cuisines qui font à manger depuis quatre ans, qui participent à des ateliers, des participant.e.s à l’école qui vont couper des légumes et des équipes qui font du pain. La volonté de lier la pensée à ses conditions de possibilités matérielles est donc centrale. La grande maison qui nous accueille est un espace duquel on veut prendre soin. Sur tous les plannings il y a un moment dédié au ménage, qui parfois se transforme en un ballet d’âme errantes vis-à-vis de quelques corps qui savent quels gestes effectuer.

Cette année nous allons nous intéresser à L’ordre des choses, et il nous semblait important de commencer cette réflexion par son sens le plus méprisé, le plus terre à terre et donc, quel dommage, le plus éloigné de la philosophie (le mariage entre matérialité est philosophie n’étant pas conclu) : le ménage. Le ménage est un maintien de l’ordre, en nous demandant principalement ce qui se joue dans ce maintien de l’ordre et pourquoi ce sont les femmes qui doivent maintenir cet ordre. On peut se demander si cet ordre est fondé sur des lois.

Nous reprendrons tout de même les questions des féministes sur le travail ménager en nous demandant en premier lieu si l’on produit quelque chose, et si oui, quoi en faisant le ménage en nous intéressant à la maison comme économie. Si je m’intéresse à ces textes c’est parce que je me demande si il faut prouver sa productivité pour sortir du mépris envers une activité, et aussi parce que rares sont les personnes qui ont essayé de voir les implications sociales de cette activité du ménage.
Dans les deux autres parties, nous nous interrogerons sur le fait de laver et de ranger qui sont les deux actions principales que recouvre le mot ménage en se demandant ce qui sous tend ces gestes quotidiens, répétitifs et nécessaires.

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deçà du partage entre l’étude générale du vivant et celle de ses formes singulières. La philosophie n’est donc qu’une forme de vie parmi les autres, mais cette forme prétend être la plus haute. Il faut donc chercher à comprendre ce qui lie l’étude des formes de vie à un plaidoyer pour la vie philosophique. Si le mot grec theoria ne signifie pas simplement « théorie », c’est-à-dire un savoir coupé de l’expérience, mais « contemplation », c’est-à-dire un certain rapport vivant à ce qui est, alors il faut examiner en quoi ce rapport peut prétendre être plus vrai que les autres.

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On verra ensuite comment Nietzsche tente de sortir de ce nihilisme. Pour cela, il lui faut reconstruire une distinction entre différentes existences plus ou moins authentiques, à l’intérieur d’un cadre où toute transcendance a été détruite. On examinera sa proposition, qui en passe entre autre par une opposition entre force et faiblesse, et on en questionnera les limites.